Sauver des vies… et plus encore

Sauver des vies

Je n’ai jamais sauvé de vie, du moins pas que je sache. Mais il ne faut pas une créativité débordante pour imaginer le sentiment que ça procure. J’imagine un mélange de fierté et de sens. Et ça doit être vrai, puisque ce sont ce genre d’histoires que je croise quand je visite les différentes pages Facebook des coopératives!

Le sentiment doit être d’autant plus fort lorsque l’impact de ses propres actions est directement observable. De recevoir des remerciements directement de celles et ceux qui ont été sauvés doit être émouvant, et procurer énormément de sens à son travail.

À chaque fois que je pense à ça, ça me fait réfléchir à l’origine de la coopération au Québec. À l’époque, les francophones étaient déjà minoritaires et n’avaient accès à rien. Si la ferme brûlait, on perdait tout. Le risque était tellement grand que les voisins en venaient naturellement à s’appuyer entre eux lors d’un incendie, en espérant recevoir la pareille quand viendrait leur tour. Ce sont ces agriculteurs qui ont les premiers canalisé l’esprit coopératif en un projet de coopérative, une mutuelle d’assurances, plus précisément, pour se protéger collectivement contre le feu à travers un fonds commun. Promutuel voyait le jour, suivie de près par Desjardins, qui a été créé sur la base de l’impossible accès à toute forme de prêt ou de crédit pour les québécois francophones, qui les empêchaient de croître et les vouaient à une assimilation certaine au reste du Canada anglais.

À la base de la création des premières coopératives se trouvaient des besoins partagés, mais pas n’importe lesquels. C’étaient des besoins fondamentaux. Et il faut peser le mot. Parce que ce qui est fondamental en termes de besoins, l’est à la survie. Autrement dit, ne pas pouvoir répondre à ses besoins de base, c’est être voué à une mort certaine. On m’accusera d’extrapoler à profusion, mais quand je pense aux vies sauvées par les coopérateurs paramédics, je pense aussi à celles sauvées par la coopération dans l’histoire.

On me permettra une autre parenthèse, et un retour vers le passé, jusqu’aux travailleurs des entreprises ambulancières pré-coopératives. Ceux qui ont connu à l’époque une menace imminente de se voir étatisés dans les années 1980. C’est par la coopération qu’ils ont lancé l’offensive. En se rassemblant en coopératives, les travailleurs de l’époque, dont certains sont toujours actifs aujourd’hui, ont décidé de mettre en commun leur besoin de vivre du sens au travail et de sauver, par le fait même, l’indépendance de leur profession. Et ça dure depuis plus de 25 ans.

Être propriétaire collectif de son entreprise, même si on n’y connaît rien à la gestion, représente une richesse incroyable. Au-delà du potentiel d’innovation illimité que cela procure, c’est aussi la réalisation que ces vies sauvées au quotidien le sont parce que des travailleurs prennent en charge leur profession. Être membre travailleur paramédic, c’est à la fois répondre de façon autonome à son propre besoin de sens, mais aussi au besoin de sécurité du reste de la population.

Et entre nous, je ne crois pas qu’une société d’État ambulancière serait à la hauteur de ce qui se fait présentement au sein des coopératives. Donc oui, il y a de quoi être fiers.

Étienne Fouquet, M. Adm., Ph.D.Conseiller principal en coopération, gouvernance et formation

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